Publié dans « Elèves »
Je vais prendre deux exemples d’élèves qui, sans l’aide ou l’initiative d’adultes, à l’origine, ont décidé de se lancer dans des actions de développement durable pendant l’année scolaire 2018-2019. Ils n’ont pas appelé leur action comme sur eduscol ou le site gouvernemental « action de développement durable » mais tout simplement ils ont agi. Un en CM2 en ville à Toulouse, le deuxième, en CE1 dans un autre département de l’académie, à la campagne. Tous deux ont remarqué que la cour de leur école primaire était jonchée de papiers ou autres déchets.
Le premier s’est constitué une bande de copains et copines pour réaliser une « Brigade anti-pollution » avec des élèves d’origines diverses, du CE2 au CM2 et comme il aime le proclamer « on l’a fait tout seuls, sans l’aide d’un adulte ! », les professeurs n’étaient pas au courant. Les seules personnes informées, ce furent les agents de service à qui ils ont, de leur propre initiative, demandé des outils de nettoyage, pelles et balais, sacs poubelle, etc. Deux cours à nettoyer.
Dès la rentrée de septembre 2019 au collège, la Brigade s’est reformée avec les CM2 entrés en sixième et de nouveaux élèves recrutés. Cette fois-ci, l’élève en a parlé aux adultes : à la principale adjointe et au CPE et à moi, professeure documentaliste qui leur ai proposé de les aider pour toutes leurs actions de communication et leur ai conseillé de voir avec leur professeur de SVT, référent développement durable.
La petite bande de la Brigade est venue me demander comment faire pour annoncer leur action aux autres élèves du collège. Nous avons alors décidé de faire des affiches en utilisant l’informatique, découpages, collages pour faire plus professionnel que des affiches écrites à la main. Ce fut un moyen pour certains encore néophytes dans l’art d’utiliser le traitement de texte, de se lancer dans le projet, avec l’aide d’élèves plus expérimentés et la mienne.
Tout était donc prêt en février, les affiches allaient être affichées quand… le confinement a eu lieu en mars !
Retour du dé-confinement fin mai, tous les élèves ont été bloqués dans leur salle de classe et le CDI a été fermé aux élèves. Question : « allons-nous pouvoir reprendre le projet à la rentrée ? » Lors des réunions de préparation de l’année scolaire 2020-2021, notre principale adjointe nous annonce que dès septembre, des élections d’éco-délégués vont être rendues obligatoires dans tous les établissements scolaires, parallèlement aux élections de délégués de classe. Nos éco-délégués nous semblent donc tout trouvés ! Rendez-vous à la rentrée !
L’autre cas dont je voudrais vous parler est peu réjouissant pour l’Education nationale et pas à son honneur. Dans une autre école primaire de l’académie et un autre département, un élève de CE1 est revenu chez lui, m’a raconté la maman, les poches remplies de déchets (papier, plastique) ramassés dans la cour de son école, avec une camarade de sa classe. On voit là aussi, que l’environnement proche, une cour d’école, peut être le point de départ d’un engagement. Il était très fier d’avoir fait ce nettoyage. D’où lui en était venue l’idée ? Là, non plus, les professeurs n’avaient pas été informés. On peut se demander pourquoi.
La maman, infirmière et proche de son fils (entre autres diagnostiqué avec « trouble du spectre autistique ») a voulu valoriser cette action. Elle a proposé à son fils, de faire un tableau avec des collages de tous ces déchets (arts plastiques) et de l’amener à l’école pour le présenter au maître et aux autres élèves. Le maître (qui est aussi le directeur de l’école) a à peine fait attention à cette production, je suppose non scolaire et non de son fait, et la maman est repartie extrêmement déçue. Bien sûr, cet élève et sa camarade n’ont pas parlé à leurs camarades, empêchés qu’ils ont été de communiquer sur une action qui les touchait personnellement, qui aurait pu en toucher d’autres et surtout déclencher des projets. J’ai appris qu’ils ont continué leur nettoyage, en revenant chez eux, les poches pleines et toujours aussi fiers.
Voilà donc des exemples qui montrent que les enfants, les élèves peuvent être autonomes et se lancer dans des projets qui les touchent personnellement. A l’école ou au collège, les élèves ne sont pas là uniquement pour écouter la parole du professeur, mais sont capables de prendre des initiatives et de s’engager dans des projets.
A la rentrée 2020, des élections d’éco-délégués devraient avoir lieu obligatoirement dans tous les établissements scolaires (elles étaient facultatives jusque-là) « l’élection des éco-délégués est désormais obligatoire dans toutes les classes de collège et de lycée, et encouragée en CM1 et en CM2 » (sur le site du Ministère). Ce sera l’occasion pour les élèves de s’engager et d’être des acteurs responsables du changement que la situation actuelle réclame. Voici un extrait du rapport de la Convention citoyenne pour le Climat publié en juin 2020, dans sa partie sur l’éducation : « Nous voulons promouvoir et apprendre les comportements écoresponsables dès le plus jeune âge et tout au long de la vie, en faisant de l’éducation, de la formation et de la sensibilisation des leviers d’action de la consommation responsable et ainsi changer les pratiques en profondeur dans notre société. » Voir une analyse des propositions sur notre site.
Nadine Lanneau, professeure documentaliste en collège
